« L’intégration vise tout d’abord à favoriser l’insertion sociale de l’enfant handicapé en le plaçant le plus tôt possible dans un milieu ordinaire où il puisse développer sa personnalité et faire accepter sa différence. Elle lui permet ensuite de bénéficier, dans les meilleures conditions, d’une formation générale et professionnelle favorisant l’autonomie individuelle, l’accès au monde du travail et la participation sociale ».
Ce texte semble extrait d’une circulaire de l’Education nationale récente éditée dans le cadre de la mise en œuvre de la loi de février 2005. La circulaire existe mais elle date du 29 janvier 1982 et ces phrases sont extraites de son préambule. Ceci montre bien que l’idée des enjeux sociaux de la scolarisation d’enfants handicapés n’est pas nouvelle. Sans doute était-elle trop novatrice à l’époque pour trouver les moyens de sa mise en œuvre.
L’idée n’est donc pas nouvelle mais elle n’a pas pris une ride. Les leçons du passé nous permettent sans doute de mieux appréhender son développement. Au delà de l’acquisition du savoir, le but principal de la scolarisation est bien de permettre, autant que possible, à l’enfant handicapé de vivre dans les mêmes relations sociales que tous les autres enfants afin de ne pas le plonger définitivement dans l’isolement.
La scolarisation doit permettre à l’enfant :
- d’intérioriser qu’il est normal qu’on l’accepte et que face à une discrimination ou une hostilité marquée, il dispose de recours avec lesquels on aura pris soin de le familiariser ;
- de faire accepter et respecter sa différence.
Ce principe a cependant une limite que José Seknadjé-Askénazi, professeur au CNEFEI de Suresnes[1] nous rappelle : « si la personne handicapée sortait du système scolaire persuadée d’une universelle bienveillance à son égard, on l’aurait vraisemblablement mal préparée à sa future vie d’adulte ». Il ne s’agit pas de créer un cocon protecteur au sein de l’école mais de laisser vivre l’enfant au milieu de ses pairs en veillant seulement que tout se déroule à peu près normalement.
L’enfant handicapé n’est d’ailleurs pas le seul bénéficiaire des bienfaits sociaux de la scolarisation en milieu ordinaire. Les autres enfants partagent les fruits de cette expérience. C’est aussi « par la transformation du regard de l’autre que la tolérance se construit et que l’identité personnelle se forge »[2]. En permettant aux élèves d’une classe de vivre quasi quotidiennement aux côté de leur camarade handicapé, on leur enseigne que derrière le handicap, il y a par dessus tout un enfant ou une personne, on efface les craintes de l’inconnu.
J’ai souvent noté que, d’instinct, les enfants ont la capacité d’accepter facilement la différence et que cette capacité n’est souvent parasitée que par leur culture personnelle. L’inconnu fait peur. L’indifférence ou l’agressivité face au handicap n’est généralement qu’un réflexe qu’il est facile d’effacer avec un peu de communication et un minimum de préparation à l’accueil de l’autre. Quand l’hostilité persiste, elle est la conséquence de l’enseignement, volontaire ou intuitif, de principes discriminatoires. Parmi les outils d’intégration inscrits dans le projet personnalisé, la communication devrait donc figurer dans les premières places.
[1] « Enjeux sociaux et projet de société », Les cahiers d’Education & Devenir n° 7, mai 2006.
[2] Dominique de Peslouan, maître de conférence à l’IUFM de Nice, « Handicap et grande difficulté scolaire : vers une intégration raisonnée », Les cahiers d’Education & Devenir n° 7, mai 2006.